J'ai tenté de me
convertir au christianisme. Mon cheminement a débuté il y a un ou
deux ans, je ne saurais même plus dire exactement quand, par mon
engagement dans le catéchuménat, accompagnée d'une fréquentation
de la messe. Puis, après un ou deux ans, donc, j'y ai mis un terme,
appelant cela une pause, un arrêt sur ce chemin, pour prendre à
nouveau ce mot que les chrétiens que j'ai rencontré employaient
systématiquement pour qualifier cette démarche. Je ne savais plus
pourquoi je m'y étais engagé. J'aimerais essayer de le comprendre.
Je crois profondément
en un certain nombre de choses. Je crois en l'existence de l'âme, et
en son immortalité. Je crois en l'inexistence de l'enfer, ou à sa
vacuité, ou à son caractère transitoire (ce qui n'en ferait,
certes, qu'un simple purgatoire), même en cas de péché contre
l'esprit. Mais je ne crois pas en Dieu (sans croire pour autant qu'il
n'existe pas), et il faut croire que cela me manquait.
Je crois aussi
profondément, mais à un tout autre niveau, argumenté, que la
religion est nécessaire à l'homme, qu'on le considère
individuellement ou collectivement – question d'équilibre en
somme, pour que l'on ne croit pas n'importe quoi, ou du moins pas
n'importe comment ; mais j'en reviens à mon cas.
Je crois, toujours
profondément, que la religion en général, et le christianisme en
particulier, et sans doute singulièrement sa variante catholique,
sont faits pour moi. Mon besoin désespéré de structure y aurait
été comblé. J'en serais sorti renforcé, droit dans mes
godasses, et plus sain psychiquement. Mais j'ai fini par en venir à
l'idée que ce n'était pas une bonne raison, ou insuffisante.
J'ignore qui a dit que
le catholicisme était la religion de la beauté, mais cela ne fait
aucun doute. Aucune ne l'égale, à mon orgueilleux avis, dans
l'architecture, la peinture, la musique – et si l'on annexe
l'orthodoxie, Dostoïevski aidant, dans le roman. J'ai un doute pour
la poésie, car on m'a dit qu'il y avait un pays appelé la Perse,
que je connais trop mal pour avoir un avis définitif, même aussi
expéditif que les précédents.
Mais ce n'est pas la
beauté, au premier chef, ou du moins pas en le pensant ainsi, qui
m'a poussé à la conversion. Il y a bien sûr le pari de Pascal, que
j'ai voulu prendre au mot. Il y a aussi ce mot d'Augustin qu'Arnauld
cite dans une lettre à Leibniz, énonçant qu'il ne faut pas
attendre d'avoir la foi pour se convertir. Il y aussi que la Croix
est une folie, et que j'aime passionnément la folie. Et ce n'est
contradictoire qu'en apparence avec mon désir d'équilibre : je
voulais une folie saine.
Il m'a pourtant fallu y
mettre un terme, que je dois avouer être définitif, bien qu'un
doute subsiste. Aurais-je dû attendre l'onction, afin de voir si la
foi me serait alors venue ? Peut-être, mais je n'y croyais
plus, je croyais le contraire, que la foi ne viendrait jamais.
Demi-apostat, je me suis
réservé une place dans les Limbes, où je bavarderai pour le
restant de l’Éternité.
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